Liberté d’expression sur Internet #amha

Ce billet est écrit en écho à celui de Pierre Olivier: Liberté d’Expression en liberté surveillée

En gros je suis plutôt d’accord, je vais donc m’attarder là où je ne le suis pas 🙂

Il est certain que ce sentiment fou de liberté que nous avons aujourd’hui de pouvoir non seulement s’exprimer mais de publier sur un espace horizontal est tout bonnement hallucinant. J’enrage parfois de voir à quel point nombreux sont ceux qui ne s’en rendent pas compte.

Maintenant les plateformes que nous utilisons sont des officines privées, souvent gratuites et dont nous sommes donc les produits. Dont acte.

So what?

Certes Pierre-Olivier a raison de le rappeler, ce n’est pas forcément évident pour tout le monde, mais effectivement en choisissant de bloguer sur WordPress.com, en m’exprimant sur Facebook, twitter ou tous les services Google dont je suis si friand, je sais que je suis à leur merci: je peux tout perdre.

Détachement

Pourtant avec les années j’ai progressé là-dessus. Je n’irai pas jusqu’à dire que je me fous de tout perdre, mais je suis de plus en plus en mode “présent”. Tout comme dans la vie j’essaye d’apprendre à apprécier le moment, j’arrive de plus en plus à me détacher de ce que j’ai posté hier. Amusant d’ailleurs de se poser ces questions quand on sait les combats d’aujourd’hui sur le droit à l’oubli. 😉

C’est un peu comme notre rapport à notre image, nombreux sont ceux qui ont peur d’une webcam, notamment parce que ça grave quelque chose qu’on ne maîtrisera pas forcément. Je suis pourtant un garçon timide, mais de plus en plus je me dissocie de mon image, ça m’aide devant un objectif. Je ne suis pas cette photo pourrie d’il y a 20 ans, je ne suis pas ce clip médiocre de la semaine dernière, je suis jérôme choain, 43 ans, fait de tout ça, mais heureusement surtout de bien d’autres choses plus importantes.

Les réseaux que nous nous faisons, les idées que nous promouvons, l’essentiel sera encore là demain en cas de fermeture de notre compte Google. Bien sûr il faudra reconnecter un peu tout sur une nouvelle plateforme, de nombreux souvenirs numériques se seront envolés, mais si une m’exclut, je ne crois pas que je repartirai de zéro, nous sommes trop liés 🙂

Aussi mercantiles que soient ces services, ils vivent sur nos inter-connexions, et malgré tous les procès en futilité qu’on leur fait, ces réseaux sociaux s’imprègnent de nos progrès, de ceux que nous faisons ensemble, et le global brain peaufine sa connectique complexe et permanente par l’apprentissage et la régulation, comme tout bon cortex digne de ce nom.

Note: tout ceci n’empêche surtout pas de penser à quelques procédures de backup bien sûr 😉

Censure

L’aspect unilatéral et arbitraire des décisions est parfois choquante, mais il y a un aspect qui me plaît: à l’heure où tout devient si procédurier, où on veut nous paralyser par des licences et des brevets à outrance, qu’une startup ne s’em…. pas pour prendre des décisions et tranche dans le vif ne me déplaît pas (je parle de services gratuits). Bien sûr quand cette startup est devenue Google ou Twitter on s’étonne plus, mais je trouve que quelque part c’est un peu le prix à payer pour avoir des boites qui avancent.

Maintenant s’ils en abusent ou que j’ai quelque chose à redire, je m’en vais.

Et quand à l’aspect big brother, aux monopoles, je crois avoir lu que Google est le premier à savoir que tout peux s’écrouler du jour au lendemain et que c’est sa pire crainte. Ces géants sont fragiles, ils ont tout intérêt à ne pas nous trahir. Vous verrez qu’un jour Zuckerberg y viendra à la transparence 😉

Flicage

Je m’en cogne. D’abord parce que j’ai le luxe de pouvoir, j’en suis bien conscient. J’habiterais en Chine ou en Syrie ce serait différent. Et encore. Si on regarde bien, on me répond souvent “oui mais si demain Adolf revient”. Si un tyran reprend les rennes chez moi, je ne pense pas qu’il aura besoin de mon compte facebook ou de mon blog pour savoir que je suis un affreux gauchiste. Il y a des tonnes de traces dans la matrice qui prouvent mes déviances globalo-humanistes 🙂

De plus je vis dans la facilité. S’agissant de l’anonymat, je n’ai jamais eu besoin de le faire mais il est évident que si demain je devais me prononcer sur des sujets trop graves ou m’impliquer dans des combats dangereux je prendrais le maquis du cryptage. Aujourd’hui je trouverai un peu ridicule de me camoufler.

Tiens en fait si, je me rappelle d’un coup en écrivant ces lignes que je l’ai fait une fois parce qu’à l’époque ce que je voulais “dénoncer” pouvait m’apporter des galères pour mon boulot 🙂

Vigilance

Ce sur quoi je suis le plus d’accord c’est sur la vigilance qu’exprime Pierre-Olivier, la nécessité de garder tout cela bien à l’esprit. Pour moi le réel danger aujourd’hui en terme de liberté d’expression ce sont plus les lobbys qui s’activent pour faire passer des lois anachroniques et dangereuses. Cette volonté mercantile et aveugle de gripper la toile me débecte.

Bref.

J’ai déjà été trop long. Essayons de conclure.

Pierre-Olivier encore une fois sur le fond je crois qu’on est d’accord. Un détail pour titiller, tu sembles te croire plus libre en hébergeant ton site. Plus indépendant ok, mais j’imagine que ton serveur n’est pas dans ta cave, tu as bien finalement un opérateur privé quelque part qui peut te faire un sale coup, ne fut-ce qu’un backup foireux 🙂

Je crois aussi qu’il faut veiller à archiver l’essentiel (un post en gestation depuis des lustres), vigilance donc, mais pour le reste je fais le choix de voler de plus en plus léger, en connaissant les risques encourus. La diversité des réseaux et la duplication de nos contenus permet aussi d’éviter le pire des blackout.

Quant au twitter “diaspora like”, je ne creuse pas, ça ne me semble pas possible pour du mainstream, mais ça mériterait une discussion entière. Pour d’autres services, je dis pas, mais twitter, je crois pas 😉

En tout cas débat toujours passionnant, merci et pardon pour cette réponse un peu longue, et encore, je freine 😉

  1. #1 par Pierre-Olivier Carles le décembre 31, 2011 - 10:09

    Joli post !
    Juste une précision car tu attaques sauvagement mon intégrité comme tu sais si bien le faire (nous savons tous que tu es sournois et qu’en secret, tu écoutes du Céline Dion) : Je ne me sens pas en totale sécurité… Juste un peu mieux protégé parce qu’il y a moins d’intervenants dans ma « chaine de production » mais le risque 0 n’existe évidemment pas.

    J’ai fait le maximum en fonction de mes moyens techniques, je backupe et archive l’essentiel sans me mettre de pression d’enfer non plus. Mais évidemment, nous sommes tous vulnérables à des degrés différents.

    « Maintenant s’ils en abusent ou que j’ai quelque chose à redire, je m’en vais. »
    C’est exactement ce que je viens de dire et de faire.

    PS : Bonnes fêtes de fin d’année mon ami !

  2. #2 par Pierre-Olivier Carles le décembre 31, 2011 - 10:16

    Ah oui, au fait, j’adore la photo !

    Pour les autres : Regardez bien celle que j’ai posté, puis revenez voir celle de Jérôme dans les détails…

    • #3 par jcfrog le décembre 31, 2011 - 5:12

      bonnes fêtes l’ami! et twitpic nous ton foie gras 😉

  3. #4 par Otyugh le décembre 31, 2011 - 3:32

    Après la philosophie, il se trouve aussi que la majorité des gens influents sur internet n’ont pas les reins pour se passer de Google ou de Facebook.
    Alors que tout le monde sait qu’ils peuvent faire des coups bas. « Je quitterai s’il le font »… C’est un peu comme dire « si ma copine douteuse me trompe, je la quitte ». Ça ne se fait pas vraiment, dans un couple sain, non ?
    Sur cette métaphore foireuse, je dirais que la facilité est plus importante que l’indépendance pour la majorité des gens, et que le mot « liberté » sonne étrange quand on le fait d’un facebook (ou d’un OS propriétaire pour aller plus loin).

    Mais quelle belle interface d’Apple ! Quel quantité de jeux de qualité sous Windows ! J’en suis la première victime. Ensuite, qu’elle fantastique liberté, je ne saurais dire, vu la quantité des contrats que j’ai acceptés pour avoir un OS, internet, aller sur facebook, google…
    Mwaip…

    • #5 par jcfrog le décembre 31, 2011 - 5:12

      effectivement, foireuse la métaphore. 🙂
      Je ne me sens en rien dans la concession ou avec une « copine douteuse ».
      ce sont de malheureux services informatiques et je place ma liberté bien au dessus de tout ça.
      « vous n’aurez pas ma liberté de penser » 🙂

  4. #6 par Arjofocolovi le décembre 31, 2011 - 5:01

    « Plus indépendant ok, mais j’imagine que ton serveur n’est pas dans ta cave, tu as bien finalement un opérateur privé quelque part qui peut te faire un sale coup, ne fut-ce qu’un backup foireux 🙂 »

    Le serveur pourrait tout à fait être dans sa cave si il le voulait. Cela demande d’autres contraintes mais c’est encore faisable (même si les puissants ont cherché, cherchent et chercheront à enterrer cette solution au plus vite). Et c’est ainsi que l’Internet a été pensé à la base. Chaque consommateur devait aussi être un acteur. Si internet n’avait pas été corrompu, si les humains pour une fois n’avaient pas cédé à la facilité, Google ne serait rien de plus qu’une PME, et le net serait presque libre. Vive la décentralisation, hébergez vous !

    • #7 par jcfrog le décembre 31, 2011 - 5:15

      pfff! 🙂
      pour moi la limite est « dois je m’auto censurer pour rester? »
      tant que je peux dire ce que je veux, je ne vois pas bien où est le problème.
      Si je souhaitais bloguer un doigt d’honneur et que WordPress me l’interdise je partirais.
      Ca ne m’est jamais arrivé.
      Je suis libre 🙂

      • #8 par Arjofocolovi le décembre 31, 2011 - 6:14

        Oui, tu es libre parce que si un jour tu veux choisir une solution d’auto-hébergement, tu peux. Pour combien de temps encore, je ne saurais le dire.

        Non tu n’es pas libre, parce que si WordPress déconne, tu devras te battre pour l’être, que ce soit en partant ou en négociant avec eux. Si on cède du contrôle sur une partie de notre vie, on perd forcément en liberté (je ne dis pas qu’on peut tout contrôler, ou qu’on peut être complètement libre, ce n’est pas le sujet).

        En fait tu es potentiellement libre.

        Mais tu le seras vraiment quand ton contrôle ne dépendra pas de « si » et de « tant que ».

        Mais je m’arrête là, je vais finir par passer pour un donneur de leçon ^^. Bonne année à tous les internautes.

  5. #9 par Moonwalker le janvier 1, 2012 - 6:57

    Débat passionnant s’il en est, merci pour ton éclairage emprunt de bon sens comme d’habitude.

    Perso j’auto-héberge (enfin pas tout à fait, j’attends la fibre pour finir ^-^).
    Mais bon si je n’étais pas barbu sur les bords du geek, ça serait plus compliqué j’en convient bien volontiers.

    La meilleure solution pour la plupart des grands communicants du global brain est a mon sens de mutualiser les ressources techniques et humaines. Il y a de plus en plus de gens compétents pour monter un serveur et le partager, et ça n’a jamais été aussi simple et aussi bon marché 🙂

    (message subliminal : join diaspora ! :P)

  6. #10 par Moonwalker le janvier 1, 2012 - 6:58

    oops, comm a effacer plz, je m’abonne 🙂

  7. #11 par plopy le janvier 2, 2012 - 11:27

    Pour que des outils libres continue a exister et à voir le jour, c’est important qu’un certain nombre (même minime) de personne les utilise.
    Jérôme, si tu peux te permettre de dire  » Si je souhaitais bloguer un doigt d’honneur et que WordPress me l’interdise je partirais. », c’est précisément parce que tu sais que d’autres outils existent. Ces autres outils n’existent que parce que un petit nombre les utilise.

    Ce que j’essai d’expliquer par là, c’est que ce n’est pas un soucis que toi Jérôme aies décidé d’utiliser des « outils fermés », ça en serait un gros si 100% des gens décidaient de faire de même, il faut une petite masse de « militant » (les geeks/libristes/barbus…), pour créer, maintenir et utiliser des solutions alternatives et ainsi assurer une forme de liberté à l’ensemble des citoyens, même si ces derniers ne les utilisent pas.

    Oui c’est un commentaire de libriste barbu. 🙂

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